Mr. Scruff « Ninja Tuna » @@@@


Ça fait presque bientôt deux ans que j’attends un album de Mr Scruff, depuis le jour où je l’ai vu mixer à la Marquise, à Lyon, lors du Festival Ninja Tune qui avait accosté sur les berges du Rhône en 2006. Jamais je n’ai passé une aussi excellente soirée de ma vie. D’habitude j’y vais juste pour écouter les sets mais cette fois je ne sais pas ce qui m’a pris, je suis allé me jeter direct dans la petite foule pour danser sans voir l’heure passer, alors que j’ai horreur de ça d’habitude ! Il passait du hip-hop old school, du funk bien groovy et du bossa nova, des tas d’autres trucs qui rythment la nuit,… tout ce que j’aime. Les gens étaient tellement dedans, tellement animés, qu’ils s’enflammaient tous à chaque fois qu’il remettait le beat. C’était trop génial, une ambiance conviviale, joyeuse et feutrée !

Alors voilà pourquoi depuis ce soir-là, je me suis promis d’avoir son premier disque dès sa sortie. Il avait des goûts musicaux très proches des miens alors il n’y avait aucune raison que je n’aime pas ce qu’il allait concocter. Puis ce jour est arrivé, à la mi-Novembre, Ninja Tuna de Mr Scruff est enfin dans les bacs ! C’est pas trop tôt. Notez que c’est lui qui dessine ses propres artwork. Et quand j’ai vu le petit dessin sur la pochette en carton recyclé, j’ai eu la même réplique que Gad Elmaleh : « comme c’est miiiignooooooon. » 

 

CD inséré, j’appuie sur ‘play’ à peine le CD déballé : interdiction de me déranger durant l’écoute d’environ 70 minutes. Ninja Tuna est à 90% comme je l’espérais : des instrumentaux imprévoyables d’une mixité musicale sans pareille qui découlent continuellement sans temps mort ni baisse de rythme, avec une première partie principalement instrumentale (à l’exception du titre avec Roots Manuva et Alice Russell), et une seconde plus boogie axée pour les dancefloors. Si je passe ce disque en soirée, sûr que je ferai un malheur ! ça commence avec une introduction efficace, « Test The Sound » aux sonorités hip-hop pour le sound-check, régler les basses, les aigus, le volume… Immédiatement après, on est comme happé pour le groove latino de « Music Takes Me Up » featuring Alice Russel. Elle chante ce grand pouvoir qu’à la musique sur les gens, celui de les rassembler et laisser la vibe emmener nos esprit ailleurs pendant que les pieds bougent au sol. 

Les beats qui découlent juste après s’inscrivent dans l’ouverture musicale propre à la famille Ninja Tune, avec des rythmes urbains accouplés à des influences jazz latino (« Donkey Ride » feat Quantic), des parties trip-hop très cinématographiques et impulsives (« Hairy Bumpercress ») qui génèrent des décors citadins dans notre sens auditif grâce aux émanations de Jazz qui s’en dégagent. Rien n’est fixé dès le départ et le moindre son est placé naturellement, avec une certaine liberté de jouer comment on veut, tel un bœuf coordonné entre jazzmen. Sauf que Mr Scruff est seul métronome à bord, il le démontre avec aisance sur l’impressionnant « Whiplash » : les premières minutes sont effrénées par un coup de batterie à faire renvoyer Mark Ronson sur le banc de touche avant de se calmer pépèrement au contact de sonorités électroniques et de trompettes bienvenues. 

Piste suivante, coupure nette. « Nice Up The Fonction » a la même fonction que le trou normand dans un festin gastronomique : proposer quelque chose de radicalement différent après le plat de résistance pour permettre de garder l’appétit des convives pour ce qui va suivre. Car en fait, ce titre en question est un pur morceau de Roots Manuva. On ne sait pas si c’est du ragga-dub, de l’électro-hop ou hip-hop « britishement » exubérant, c’est tout ça à la fois. Du Roots Manuva pour être plus clair. On garde l’aspect électro, on fait venir Danny Breaks et ça donne cette amusante singularité qu’est « Bang on the Floor ». 

 

« Get On Down » sert de transition dans le sens où cette track inverse la tendance entre la partie partiellement instrumentale et l’autre irrésistiblement dansante. Un groove funky s’installe au fur et à mesure sur une rythmique proche de la house music, il finit pour nous emmitoufler complètement pour nous mettre définitivement dans le move. La vibe de « Hold On » se veut suave, lounge et cuivré, emmenée par la voix veloutée d’Andreya Triana. Le genre de morceau chaleureusement smooth qui détend l’atmosphère un max. Il ne manquait plus que du broken-beat !

Et ça se poursuit avec « Give Up To Get », avec un sample de voix cette fois, dans un style qui rappelle les instrus de Pete Rock sur Surviving Elements. Cette piste instrumentale ne lasse pas une seule seconde malgré ses 6min45 de durée, de même pour « Kalimba » qui maintient l’allure. On finit par revenir sur un plateau house music avec Pete Simpson sur « This Way », avec un côté Amp Fiddler qui n’est pas déplaisant à entendre avant de se quitter avec le finish traditionnel de Mr Scruff, sur le thème du bossa. « Stockport Carnival » nous transporte sur les côtes du Pacifique dans un décor de carte postale en un tour de piste. Quand la chanson se termine, cela nous rappelle à quel point il est dur de rentrer des vacances.

 

Replay (x le nombre que vous voulez).

 

Pas moyen de passer Ninja Tuna en mode aléatoire, sous peine de briser le fil entre les tracks : tout les morceaux s’enchaînent dans une linéarité impeccable. L’ensemble aurait été parfait si seulement le rythme était ponctuellement un peu plus cadencé, afin de redonner de l’impulsion sur certains passages, ou peut-être une prise de risque susceptible d’apporter quelque chose d’unique. Mais ceci n’est pas un vrai argument pour juger de la qualité des compositions. Ce qui compte ici est de se laisser porter par la musique, le rythme, les sons. C’est d’autant plus parlant quand on savoure cet album quel que soit son humeur et ses appartenances musicales. Merci m’sieur Scruff !

3 commentaires Ajouter un commentaire

  1. BDLB dit :

    Scruff et Triana : 2 mégas artistes.
    A. Triana sort son premier album le 23. Et ouai ! J’écris pour http://bientotdanslesbacs.wordpress.com/ chez BDLB on a adoré ! Dites moi ce que vous pensez de cette petite chronique : http://bientotdanslesbacs.wordpress.com/2010/08/04/andreya-triana-lost-where-i-belon/

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  2. Flow dit :

    Très bonne sortie

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  3. Aly dit :

    J’ai hate de découvrir ça, j’avais suivi le mini buzz qu »il y’avait eu autour de trouser jazz…
    J’ai laché malgré le talent, je sais p’tet pas encore assez ouvert musicalement, mais il est vraiment très fort.

    Encore une question susidiaire :
    T’aurais une chro’ d’Exile, le buzz commence à croître, et en dehors des vidéos MPC et Radio et son dernier clip, j’le connais pas assez!

    Spécial dédicace, j’irai certainement voir Onra pour la soirée hommage à Jay Dee… le fameux Onra de Chinoiseries ou autre the Big PayBack (avec Mr Peter Hadar)!

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