IAM « Ombre est Lumière » @@@@@©


En 1993, la Cité Phocéenne assistait à l’avènement du projet pharaonique des Imperial Asiatic Men, un événement sans précédent qui allait marquer à jamais le Hip Hop en France : Ombre est Lumière, premier double-album de l’histoire du rap. La venue du deuxième album d’IAM a été saluée par la population française, chantant tous en chœur leur hymne glorieux « Le Feu », dont le refrain a été inspiré à l’origine des chants footballistiques en l’honneur de leur fière équipe de l’Olympique de Marseille fraîchement championne d’Europe.

Rétrospective originale écrite en 2007

C’était la grande époque du mia aussi, Chill alias Akhenaton nous entraînant sur quelques pas de danse sur un sample de « Give me the Night » de George Benson. Beaucoup de souvenirs sur « Je Danse Le Mia » (‘mia’ est un synonyme de ‘kéké’) et son ambiance discothèque alimentée en funk des années 80, le genre de chanson que tout amateur de rap français se doit de connaître par cœur, et peu importe les moqueries qu’elle a suscité, elle fait partie du patrimoine musical français. Le succès de cette chanson ainsi que « Le Feu » ont véritablement placé le groupe pyramidal sur orbite, tout comme l’autre groupe phare du rap français en provenance du 93, le Suprême NTM.

Mais Ombre est Lumière ne se limite pas à deux titres parmi 38 pistes, dont de multiples interludes (le mythique « Le Retor de Malek » en fait partie). Car tout ce qui a fait des marsiliens le porte-drapeau du rap français se trouve à l’intérieur des deux disques. Passage obligé sur un des morceaux emblématiques, le « Shit Squad », qui a suscité de nombreuses vocations herbeuses au sein de la jeunesse marseillaise. Un de leur grand classique assurément. Bien évidemment, les textes d’Akhenaton et Shurik’n sont empreints de mysticisme, d’images, de références historiques et mythologiques, parfois alambiqués, métaphoriques forcément, hiéroglyphiques, complexes et riches (« Le Dragon Sommeille », « Pharaon Revient », « Cosmos »,…). D’ailleurs, les deux MCs signent quelques de leurs meilleurs morceaux, à savoir le poétique « Où Sont Les Roses » d’AKH et l’histoire dramatique du « Sachet Blanc » de Shurik’n, claquant des doigts sur un échantillon de piano mélancolique et un air de saxophone plaintif. Pour en rester dans des fictions réalistes conjugués avec du fatalisme, « Le Fugitif » et « L’Aimant », là encore un incontournable d’IAM puisqu’il s’agit du morceau qui a inspiré le film Comme Un Aimant en 2000.

Autres morceaux qui font de Ombre est Lumière un album grandiose, les formats panoramiques en stéréo qui déferlent dans les oreilles tels des films de guerre ou péplum, comme lorsqu’une armée toute entière part à la charge. Ici, une bande de hooligans se jettent sur vous en criant « Achevez-les », ou alors « Je Lâche La Meute », en dévastant tout sur son passage et ne laissant qu’un champs de ruine. Véritablement les pics énergétiques de l’album. Transition sur une autre facette très appréciée des IAM : leur humour et sens de la dérision. C’est parti pour une deuxième série d’ « Attentat » (2, le retour), plus comique que son prédécesseur, une « Interview » tranquille et un petit clin d’œil à Henri Salvador avec « Le Repos C’est La Santé », et ouais. Après tout, Marseille est une ville où il fait bon de rire en terrasse autour d’une boisson anisée, à mater les filles et profiter de la Méditerranée.

Tous les visages du groupe sont dévoilés sur ce monument classé historique. Une encyclopédie rapologique, le souvenir d’une époque, la découverte d’un nouveau genre, Ombre est Lumière a définitivement fait connaître les IAM à la France entière et au-délà des frontières.

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