La sortie de ce nouvel album posthume de J Dilla sonne la fin d’un long imbroglio juridique et financier pour la famille du légendaire producteur de Detroit. Pour résumer, les droits de successions des productions de J Dilla étaient bloqués ce qui explique pourquoi depuis 2008 (depuis Jay Stay Paid on dira), aucun artiste proche du rappeur (que ce soit Erykah Badu, les Roots, Common, Madlib…) n’a pu profiter de nouveaux beats, à moins qu’ils en aient bénéficiés avant sa mort comme son frère cadet Illa J, Raekwon, MF Doom ou encore Q-Tip.
De plus, la famille Yancey croulaient sous les dettes. Car avant sa disparition Dilla, qui était comme vous le savez gravement malade, a cumulé de nombreuses factures de soins médicaux et de frais hôpitaliers. Résultat la famille, déjà en difficulté, ne voyaient pas les royalties de leur fils qui servaient à rembourser ces dettes. À cause de cette situation désespérée, ils n’ont pas eu d’autres choix que de revendre leur maison. Ce n’est qu’au début de l’année 2010 qu’un accord a pu être statué avec l’administrateur en charge des successions en fondant The J Dilla Foundation, laissant les droits d’utilisations du catalogue de J Dilla aux divers membres de sa famille, notamment sa mère Maureen ‘Ma Dukes’, qui s’est longtemps battue pour que son défunt fils puisse vivre à travers sa musique.
Bon, nous y sommes. Rebirth of Detroit est enfin une réalité, disponible en import pour la modique somme de 28 euros (source Amazon). Comme son nom l’indique, cet album contenant des productions pas toujours inédites de Dilla se concentre sur les emcees locaux, connus ou non: Guilty Simpson, Phat Kat, Beej, Loe Louis, Nick Speed, Tha Almighty Dreadnautz, Frank Nitty et Illa J qui forment le CakeBoys (« Do It For Dilla Dawg« ), Fat Ray, Supa Emcee, Chuck Inglish des Cool Kids, Danny Brown,… Hélas non, il n’y a pas T3 des Slum Village comme on s’y serait normalement attendu. Mais avec pas moins de 23 tracks, il y a de quoi largement se consoler avec une pelleté de bangers redoutablement simplistes aux sonorités électro (« City of Boom« , « Big Thangs » feat Esham, « Dillatroit » avec le trio d’enfer Guilty Simpson/Nick Speed/Supa Emcee, le single « Jay Dee’s Revenge » avec l’impressionnant Danny Brown, , et j’en passe…), ou à l’inverse des titres plus posés comme « Detroit Madness » de Phat Kat, « Houseshoes Was Spinnin’« , « The Best Who Ever Did It » et « My Victory » pour son très bon sample soulful. En tout cas tous les rappeurs du 313 présents font honneur à Dilla et s’en sortent avec les honneurs avec des perfs de premier ordre.
Il n’y a pas que des trésors cachés dévoilés au grand jour dans cet album. « Requiem » est une version améliorée de « Trashy » (extrait de la compilation rare Vintage) grâce à la présence du flûtiste Allan Barnes, « Detroit Game » et « Motor City Twirl » reprennent des beats issus de Jay Stay Paid (respectivement « Make it Fast » et « See That Boy Fly« ). Le titre d’Amp Fiddler, « Let’s Pray Together » – et ça fait très plaisir d’entendre le chanteur depuis si longtemps! – ressemble étrangement à une version retravaillée de « Dooinit » de Common (Cf Like Water For Chocolate). Sans compter quelques instrus qui semblent être des maquettes améliorées. Ce n’est pas une vraie critique mais je ne pense pas qu’il était utile d’en faire trop avec Rebirth of Detroit. Mais comme dit le proverbe, « abus de biens ne nuit pas ». Le plus important, c’est que l’héritage de J Dilla soit entre de bonnes mains, et c’est le cas, croyez-le.