Après Asher Roth, Kid Cudi et Drake, au tour de Wale de faire son entrée dans la cour des grands avec Attention: Deficit. Originaire de Washington et révélé très tôt par son street-hit « W.A.L.E.D.A.N.C.E. » aux MTV VMA 2007, il tape dans l’oeil de Mark Ronson (producteur de Rhymefest et Amy Winehouse) cette même année lorsqu’il lui propose de participer au remix de « Smile » de Lily Allen. Conséquence il signe sur AllIDo Records. Mais ça aurait très bien pu être Roc Nation, pour qui son pote Young Chris a joué les intermédiaires.
Ce sont les mixtapes qui ont surtout fait le buzz de ce rookie et sa reconnaissance croissante ne lui ont pas fait perdre les pédales, la preuve : ses dernières tapes Mixtape about Nothing et Back to the Feature [cliquez ici] sont de très bonne facture. Mais je sais par expérience que l’enthousiasme provoqué par la qualité des mixtapes peut très vite se transformer en désillusion une fois l’épreuve du premier album tombée. En ce qui concerne Wale, il a réussi son examen de passage.
Quatorze titres pour juger des compétences du rappeur et valider – en quelque sorte – son entrée dans le rap game. Il faut se rendre compte que Wale a énormément de chance déjà d’en arriver là, car bon nombre de rookies promis à un bel avenir n’ont jamais eu l’opportunité ou presque de sortir au moins un album en major (Saigon, Papooe, Jae Millz, la liste est longue). Et quand ils y parviennent, le résultat est souvent casse-gueule.
Ç’aurait très bien pu être le cas avec le single « Chillin’ » à cause de son invité : la chanteuse provoc’ et surdouée Lady Gaga. Le hook étant minimaliste, Wale ne se fait pas griller la vedette sur cet instru des Cool & Dre. Cette tentative très risquée s’est soldée par une attente accrue. Les retours sur Attention Deficit étaient généralement très positifs, les suspicieux ont préféré passer à côté mais je pense qu’ils ne manqueront pas d’y jeter une oreille. En revenant à ce que je disais sur le bol que Wale a de pouvoir franchir cette étape du premier album synonyme de décollage de sa carrière, il l’introduit par une introduction modestement triomphale sur fond de trompettes, à prendre dans le sens où il n’exerce pas son égo mais son emceeing en plaçant de bonnes punchlines. En arriver là, traverser ce qu’il a traversé, est une victoire pour lui.
Ce qui ressort de Attention Deficit est de la fraîcheur, de la nouveauté et quelques prises de risque. Tout en gardant la recette ‘hop since 78’ (samples, beats, rimes, flow…), Wale et ses producteurs ont su moderniser le truc pour faire du vrai hip-hop 2009. Hormis le featuring pop avec Lady Gaga que l’on pardonne. Qu’on se rassure, il n’y a pas de délires électro-pop ou de formatage particulier et encore moins de prises de becs pour des droits d’usage de samples, les instrumentaux sont très bons et sentent le neuf. « Mama Told Me » échantillonne du Kool & The Gang et sonne moderne, « Contemplate » du Rihanna dont l’intégration donne l’impression d’une collaboration virtuelle, le très touchant « Diary » reprend le thème d’Amélie Poulain composé par Yann Tiersen et l’apport de Marsha Ambrosius ne rend que l’émotion plus forte. On peut très bien piocher dans d’autres genres et faire en sorte d’avoir un produit real hip hop.
C’est à ce moment qu’on se pose la question de savoir si ça vaut la peine de faire des crossovers avec l’électro, la pop ou le rock quand on entend les beats que Wale a opté. A chaque fois, il y adapte son flow et développe un thème en profondeur, sauf bien sûr quand il s’agit de titres plus légers comme « Let It Loose » avec Pharrell des Neptunes, posant sur un son décalé qui tranche littéralement avec les treize autres morceaux. Rien qu’un dérapage contrôlé qui peut servir de single de secours. Les sonorités 8-bit que Mark Ronson incrémente sur « 90210 » sont plus digestes grâce à une belle mélodie.
Beaucoup de figurants sur Attention Deficit et pas des moindres. Attention, ne pas parler d’album solo. En plus de ceux que j’ai déjà cité, des VIP, rejoignent Wale un Bun B sur « Mirrors », bonne track en partie grâce à son sample seventies, une apparition de K’Naan « TV on the Radio », portant une touche d’humour et d’exotisme très appréciable, et les poulains de Roc Nation Mélanie Fiona et J.Cole sur « Beautiful Bliss » (co-produit par DJ Green Lantern), encore une track réussie. Sans trop forcer, Wale n’a pas besoin de réhausser son niveau pour se mesurer à un Bun B. Je me demande juste ce que Gucci Mane peut bien foutre au si ce n’est récupérer pour arrondir ses fins de mois mais on comprend mieux en voyant le titre : « Pretty Girls ».
Entrons un peu plus dans la critique finale. Si ce premier LP est bon, ce n’est pas seulement parce que Wale possède un talent supérieur à la moyenne mais parce que son producteur éxécutif s’en est donné les moyens : featurings de marque et producteurs à la mode (les Neptunes, Cool & Dre,…). Ont été annoncés Just Blaze et 9th Wonder mais aucune trace d’eux. Travailler avec Bun B, Chrisette Michelle, Pharrell et compagnie est une sorte de passage obligé pour s’intégrer dans le mainstream et apporter de l’attrait pour ce disque.
Quoi qu’il en soit, le véritable tour de force tient du fait que Wale se trouve autant à l’aise sur les productions sophistiquées ou typiquement hip-hop qu’avec ses collaborateurs de longue date (Mark Ronson, Best Kept Secret qui a participé sur ses mixtapes), ce qui ne dénature en rien son style et son flow malléable en dépit d’une certaine hétérogénéité musicale provoquée justement par le choix de producteurs aux styles bien marqués. Les invités viennent également d’horizons très différents sans qu’ils effacent Wale, car celui-ci maintient facilement notre attention par ses lyrics et son flow.
Attention Deficit ne sera pas disque d’or en termes de ventes, il sera certainement platine dans notre estime. Je ne dirai pas ça avec conviction s’il n’avait pas assuré à ce point, jusqu’à me convaincre définitivement dans les derniers instants avec « Prescription ».
P’tit truc entre nous : si vous ne trouvez pas l’album dans les bacs (ce qui risque d’être le cas car c’est un import), faites une recherche sur Deezer… ;)
Pas encore écouté j’avais kiffé ses nombreuses tapes, le mec était prometteur. Va falloir que je m’y mette, ta review m’a motiv’.
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Je lui trouve vraiment une ressemblance avec Kanye West dans le flow et la voix. Non ?
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Dans le timbre de voix alors… mais faut tendre l’oreille…
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J’aime son album, enfin surtout quelques morceaux mais j’aime bien ce que tu en retires dans ce billet. Trop d’invités à mon gout. Mention spéciale pour Diary qui est de loin ma préférée. Sinon, Wale a une aisance naturelle au mic. Pour l’avoir vu sur scène, je trouve que c’est vraiment un bon MC. Cheers!
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Trés bonne chronique du trés bon « Attention Deficit »!!! Il a su bien s’entourer, même si certain invité aurait était dispensable (La prod de Pharell qui n’a aucun rapport avec le reste de l’album ou Gucci Mane que je ne supporte pas!). Pour moi c’est l’une des grosse sortit Hip-Hop de cette année!
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