Street Hop de Royce Da 5’9 produit par DJ Premier, présenté tel quel, ça suscite beaucoup d’excitation. La toute première fois que Primo a produit pour Royce, c’était sur son premier LP Rock City, l’association des deux a fait un grand « Boom ».
Que Primo gère l’exécutif est l’assurance d’un album lourd et solide. Si je dis ça, c’est que le principal défaut des précédents albums solos de Royce venait de la faiblesse de certaines prods qui ne lui convenaient pas. De toute façon tout le monde vous le dira, Nickel Nine est surtout reconnu pour ses perfs énormes, ses lyrics hardcore, ses punchlines et des flows déments.
Cette année son actualité a rempli les colonnes des pages web et des mags hip-hop par les biais des Slaughterhouse (qui a suscité un gros buzz), ses mixtapes Bar Exam, sans compter sa réconciliation avec son mentor Eminem. Mais plus que tout, Detroit attendait Street Hop, seconde sortie majeure de la ville derrière Relapse.
Une des armes favories de Royce Da 5’9 est son ‘gun talk’, qu’il exerce sur « Gun Harmonizin’ » avec son comparse Crooked I. Le refrain est impressionnant : il crache des rafales de balles, sans stopper, plusieurs coups par seconde. Une partition de coups de feu. Pas assourdissant, on est abasourdi, cloué sur place. Ses démonstrations de emceeing forcent l’admiration si l’on écoute « Dinner Time », son flow bien calé sur le beat avec en prime un feat de Busta Rhymes, « New Money » idem et « On The Run » pour son storytelling d’un criminel en cavale. On lui pardonne même son utilisation d’autotune sur « Far Away ».
La vedette de Street Hop est nulle autre que DJ Premier, qui lui met à disposition trois instrumentaux de valeur puisqu’ils structurent les fondations de cet album. Il y a d’abord « Something 2 Ride 2 », profitant d’un refrain chanté de Phonte Coleman, le fantastique « Shake This », grâce un sample fabuleux grimpant en intensité et le final « Hood Love » featuring Joell Ortiz et Bun B. Les autres beatmakers sont très fiables, comme Streetrunner qui a fait ses preuves sur Slaugtherhouse, Nottz, Emile, Denaun Porter et Q-Tones. Ce qui n’empêche pas certains instrus d’être bancal (« Soldiers », « Mine in Thiz » avec Mr Porter), puis ce « Thing For Your Girlfriend » honteusement r&b avec un premier couplet de K-Young qui n’a rien à faire là.
Point noir : l’absence de Black Milk. On espérait que le meilleur emcee de Detroit (en dehors d’Eminem bien sûr) coopère avec le producteur underground le plus côté de la ville. A notre grand regret, non mais on espère que ça se produira un jour. Un autre truc agaçant est le manque flagrant d’inspi des titres que composent cet LP, complètement bateau et souvent récurrents dans le rap cainri.
Quelques featurings se rangent même niveau que Royce mais le dépasser est mission impossible. On retiendra les rimes meurtrières de Joell Ortiz sur « Warriors » (qui réunit les Slaughterhouse au complet) et la présence imposante de Trick Trick sur « Gangsta ». Melanie Rutherford, bien qu’effacée du tracklisting, est en charge de parties chantées.
La collaboration entre Royce et Primo est satisfaisante, largement. Evidemment, il y a quelques bémols à notifier mais le talent microphonique de ce mangeur d’instru est à la hauteur de sa réputation. Rarement un rappeur paraît si dangereux une fois un micro dans la main. Street Hop fait très mal. Maintenant on peut rêver mieux : une collabo avec Em et Black Milk.

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