Certains auditeurs de rap cainri ont raison de penser que la qualité du rap eastcoast est tirée par le bas si on étudie la question de Fat Joe. Celui qui dans les années 90 a lancé la carrière de Big Pun et qui fut un des piliers du D.I.T.C. n’est plus que l’ombre de lui-même à l’heure où je vous parle.
La sortie de J.O.S.E. 2 permet de faire le point depuis son prédécesseur Jalous Ones Still Envy qui nous ramène huit ans en arrière, période où Fat Joe était au top de sa carrière. En effet, J.O.S.E. premier du nom (dont sont extraits les tubes « What’s Luv » avec Ja Rule & Ashanti et « We Thuggin » feat R Kelly) s’est officiellement vendu à plus d’un million d’exemplaires au pays de l’Oncle Sam. C’est après que sa cote de popularité a dégringolé proportionnellement à ses scores de vente… jusqu’à atteindre le fond avec ce grotesque J.O.S.E. 2. Comment a-t-il pu tomber si bas ? Analyse.
L’album qui a suivi, Loyalty, a essuyé de mauvaises critiques mais a tout de même été certifié disque d’or. Depuis, Fat Joe était tiraillé entre l’idée de renouer avec le succès commercial et rester fidèle à New-York dans l’esprit. Il sort All Or Nothing en 2005 avec lequel il parvient tant bien que mal à trouver un compromis entre les deux mais il finit par quitter la major Atlantic. De retour en indépendant avec un deal de distribution chez EMI, il sort Me, Myself & I qui d’après l’intéressé devait sonner new-yorkais. Le hic c’est qu’il est produit par une majorité de producteurs basés à Miami et contient des feats tous sauf eastcoast. Un problème d’éthique qui vire à la schizophrénie sur Elephant in the Room, un LP 50% commercial, 50% NYC.
En même temps que sa carrière a glissé sur une pente savonneuse, son crew le Terror Squad, qui pourtant a cartonné en 2004 avec le tube « Lean Back » se désagrège au point de compter que deux membres actifs : Fat Joe et l’assourdissant DJ Khaled. Remy Ma est en prison et les autres ne donnent aucun signe de vie. C’est aussi cette année 2004 que débuta son beef avec 50 Cent qui l’a couvert de ridicule et accéléré sa descente et sa perte de poids.
En annonçant J.O.S.E. 2, on s’imaginait un album dans une optique commerciale avec quelques tracks rap new-yorkais. Un peu comme son précédent disque sauf que le pire était à craindre aux vues du contexte : Lil Wayne, Ron Browz, Akon, Swizz Beatz, T-Pain, Jim Jonsin, The Inkredibles sont cités et les producteurs font soit partie de cette liste, soit sont des anonymes. Et pour couronner le tout, il reprend son beef avec 50 là où il l’avait laissé en déclarant que « 50 est malade tellement cet album est hot. » Risible, il continue de s’enfoncer. Les moqueries commencent à venir des personnes qui le soutenaient autrefois et il faut avoir écouté J.O.S.E. 2 pour en connaître les raisons.
D’abord parce que ça démarre par une double couche d’autotune avec « Windin’ On Me » (que l’on connaissait depuis la mixtape The Leak 6 de Lil Wayne), parce qu’on a droit au featuring d’Akon (pas la peine d’écouter « One » plus de dix secondes), de T-Pain pour une troisième couche d’autotune… Que des types qu’on retrouve sur les albums de tout le monde ! C’est exaspérant à la fin… Une grosse partie de l’album concentre des riddim Dirty South et Trap Music artificiels qu’on entend partout (« Aloha » feat Pleasure P, « Okay Okay », « Cupcake »…) et des tracks new-yorkaises tout aussi réchauffées (« Joey Don’t Do It », « Ice Cream » feat Raekwon et le potable « Congratulations » feat Rico Love). Lil Kim qui effectue un retour hasardeux manque le coche en posant sur le très cliché « Porn Star » et Swizz Beatz lâche un beat ultra-superficiel (« Blackout » feat Rob Cash). Quand « Music », la 12e et dernière piste, arrive, on se demande si Fat Joe se fout pas un peu de notre gueule…
Est-ce que Fat Joe s’est laissé pervertir par le système ? Est-ce qu’il surestime trop sa hype ? Une chose est sûre, c’est que sa gloire appartient au passé et que sa notoriété actuelle s’émiette dangereusement. Joey a craqué, J.O.S.E. 2 (qui peut très bien signifier « Joe Organise Son Enterrement ») est une belle daube. Commerciale, je ne sais pas. Ce n’est pas un jeu de mot d’affirmer que Fat Joe a eu les yeux plus gros que le ventre car cet album est un énorme bide (sans vouloir faire allusion à son embonpoint) qui par l’effet de l’attraction gravitationnelle restera cloué en bas de l’échelle.

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