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Danny Brown « uknowhatimSayin¿ » @@@¾


Cet album de Danny Brown produit par Q-Tip est sorti le jour de la naissance de ma seconde fille Sibylle, le 4 Octobre 2019. C’est comme ça que je m’en rappelle de cet opus… Et c’est aussi pour cette même raison que mes souvenirs sont brouillés, je n’ai jamais pu me poser à cette époque pour l’écouter tranquillement comme il se doit parce que : le parenting.

J’étais pourtant très excité d’écouter uknowhatimwayin¿ parce que le nom de Q-Tip était crédité, j’ai même sauté au plafond en apprenant la nouvelle, façon Jeff Goldblum dans La Mouche. Mais avant d’écouter, d’abord : quelle transformation ! Pas Jeff, Danny. Ce type zinzin de Detroit, qu’on croirait le résultat d’une semence accidentelle d’ODB qui venait de sortir après deux ans d’internat pour prendre des vacances, et qui retrouve pépère ses bonnes vieilles habitudes, mais en étant plus… sage? Payer cher un dentiste (sans sécu ni mutuelle) pour recoller une incisive supérieure, se couper les cheveux et porter un costard tout neuf n’ont pas été les seuls efforts consentis par ce doux-dingue de Danny Brown pour paraître plus civilisé, présentable, il s’est réellement calmé sur la drogue et a du presque ré-apprendre le rap. « An ego death type thing » dixit le Detroyen.

Prendre Q-Tip comme producteur exécutif semble un choix judicieux : il a été très proche de J Dilla durant la seconde moitié des 90s. La proposition d’instrus electro-indus’ pour « Dirty Laundry » ne lui donne que raison. C’est du Motor City huile pure. Tip a remis Danny sur les rails (et pas ceux de coke), ça s’entend sur « Best Life » et « Combat » (avec une petite apparition non-créditée de Consequence), les deux autres titres qu’il propose au rappeur avec son tempo bien à lui. A Danny d’avouer : « c’est l’album de Q-Tip. Je ne mérite aucun crédit, je suis qu’un acteur dans son film ». Il aura réussi ce tour de force d’aider Danny Brown à se concentrer et se contenir, alors sa folie se traduit autrement. Ecouter Daniel Maron plus ‘clean’ avec des lyrics toujours ché-per rend l’expérience plus bizarre qu’attendue, comme sur ce gangbang de l’étrange « Belly of the Beast » (avec l’anglo-nigérian ObongJayar) ou l’absurde « uknowhatimsayin¿ » qui retourne le cerveau sans secouer.

On retrouve aussi Paul White (qui a produit entièrement Atrocity Exhibition), le jeune excité JPEGMAFIA sur le nerveux « Negro Spiritual » (conçu par Flying Lotus et Thundercat), Blood Orange, ou bien les Run The Jewels sur « 3 Tearz », un de mes titres préférés. Parce qu’ils en ont carrément rien à foutre de la vie dessus alors autant faire de la merde, et que c’en est presque fun, le tout sur une prod ranplanplan de JPEGMafia (encore lui) qui sample… Yoko Ono.

Après des réécoutes plus attentives (à la ré-ouverture du site en 2025), uknowhatimwayin¿ est un album qui me satisfait… pas complètement. Être plus raisonnable est important, je ne dis pas le contraire et qu’il ait pu combattre ses addictions mérite qu’on le félicite. En plus, ses lyrics sont fous et ses flows incroyablement maîtrisés, tel un numéro de Jim Carrey, avec des prods très originales. Mais quitte à dresser un chien fou, c’est important aussi qu’il puisse sauter dans tous les sens pour évacuer le trop plein d’énergie. On sent que ça démange Danny de partir en vrille et c’est bien cet aspect-là qu’on adore chez lui et qui manque sur ce quatrième album. Un immense talent et folie douce, mis sous cloche.

LA NOTE : 15,5/20

chronique ecrite le 17 novembre 2025

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