Connu depuis son apparition au sein des Tribe Called Quest sur Beats, Rhymes & Life en 96, Consequence a réapparu en 2002 sur le terrain saturé des mixtapes (dont Take’Em To The Cleaners et A Tribe Called Quence) avant de signer chez l’écurie G.O.O.D. Music de Kanye West. Des apparitions discrètes et confidentielles pour cet homme de l’ombre qui aurait dû éclater au grand jour depuis longtemps, en tout cas bien avant son couplet sur « Gone », extrait de Late Registration. Une mise en avant tardive, dont seule la persévérance a permis de porter le labeur à son terme avec Don’t Quit Your Day Job !, premier album major de ce cousin de Q-Tip.
Curieusement, le tracklisting prête à croire que ce disque – sorti presque anonymement – n’a pas bénéficié d’une réelle implication de la part de son label, ni de soutien promotionnel. Des détails traduisent le certain désintéressement que suscite ce talentueux artiste, comme le rajout de « The Good, The Bad & The Ugly », un bootleg datant de 2003 qui figurait sur la première version piratée de College Dropout de Kanye West. Pareil pour « Grammy Family » (un des gros son de la compilation de DJ Khaled sortie en 2006), un titre justifié puisque Consequence a été nominé, tout comme John Legend et Kanye, aux prestigieux Grammy Awards en 1997 avec les Tribe. Pas évident de relativiser, se dire que ce sont de très bons morceaux n’empêche pas de crier au comble, ou à l’arnaque. Tant pis également pour les absences notables de Andre 3000 (qui était appelé à travailler sur cet opus) et de Q-Tip.
Alors peut-être faudra-t-il préciser à nouveau que « The Good, The Bad & The Ugly » et le single « Grammy Family » étaient tout de même les points forts du CV de Consequence, sur des productions signées Kanye West. Après tout, c’est une idée louable de les voir retrouvées sur un format CD. Alors laissons ces points de côté pour se focaliser sur le qualitatif. Dont Quit Your Day Job arbore la thématique du métro-boulot-dodo, sous un angle moins social que Rhymefest et son Blue Collar. Mais quelque chose de frappant dès les premières mesures débitées sur « Day Job », c’est l’intonation du flow posé de Consequence, très proche de celui de Kanye… Tiens tiens, juste quand les rumeurs de ghostwriting circulent à son sujet. Bref, Cons raconte la dure réalité métropolitaine, la sienne, celle de la monotonie de l’afro-américain moyen qui bosse dur, avec un rêve comme seul espoir, celui de devenir rappeur. « Don’t Forget ‘Em », l’unique nouvelle prod de Kanye West, parle de ces gens qui vivent au jour le jour, « Uncle Rahiem » des discordes familiales à gérer (avec l’oncle ronchon joué par la légende DMC), etc… Pour assurer la cohésion de l’album, les trois dialogues interstitiels (ou skits) et les outros mettent en scènes des moments de cette pénible journée-type de cet homme qui veut tout plaquer pour aller en studio enregistrer des morceaux. Cons a gardé avec lui cet esprit Native Tongue, ce qui se répercute sur un choix de productions résolument Hip Hop, rythmées et avec des beats enjouées (« Uptown », « Night, Night ») et des sujets légers, à l’image du single « Callin’ Me ». Le genre de son qui font bouger frénétiquement la tête et les jambes, ajoutez un flow soutenu et des rimes jamais ridicules, et vous avez là le kit complet de vrais bons morceaux de rap. Le laid-back « Disperse » feat Really Doe & GLC réunit tous ces éléments en revenant au thème de départ, ou comment parler de problèmes d’argent sur quelques claps pour faire danser.
Dans un registre plus soft sur mélodies de guitares blues sèches, « Pretty Little Sexy Mama » et « Feel This Way » (avec encore une fois un John Legend remarquable) montrent le côté tendre de ce personnage sympathique qu’est Consequence. Et pour finir l’histoire sur « Who Know My Luck Would Change », rien de tel qu’un sample de slow jam de feu Luther Vandross. Cela ne vous rappelle-t-il pas un refrain par hasard ? Pour clôturer avec le traditionnel mot de la fin, Don’t Quit Your Day Job ressemble à une comédie musicale rappée par un très bon MC, ce qu’on savait déjà, et pour cause, l’album est homogène grâce à une chronologie bien agencée parmi les morceaux retenus (même réchauffés). Voilà, c’était l’histoire de Consequence, un bonhomme qui voulait réaliser ses rêves en signant sur Gettin’ Out Our Dreams Music, juste pour faire de la bonne musique.