Gangstarr, c’est d’abord un configuration très basique : un DJ et un MC, en parfaite symbiose. D’un côté, aux platines nous avons l’inoxydable DJ Premier et de l’autre, au micro, le grand maître à penser Guru. C’est grâce à cette alchimie totale entre ces deux hommes que nombreux de leurs albums sont devenus cultes, classiques, jusqu’à atteindre le sommet de leur art avec Moment Of Truth, presque dix ans après leur premier album, No More Mr Nice Guy sorti en 1989.
Chronique originale écrite en 2004
Moment Of Truth marque l’apogée de Gangstarr (ou Gang Starr si vous préférez) après quatre longues années d’absence après Hard to Earn. Le duo new-yorkais n’avait pas fini de dominer du haut de l’Everest. Entre deux personne n’a chômé, Guru a livré le grandiose Jazzmatazz volume 2 tandis que Primo livrait des beats boom-bap pour les futurs titans Jay-Z, Nas ou encore KRS-One et Jeru tha Damaja. Alors pour leur retour avec ce cinquième album, Premier y a concocté des beats indémodables, capable de faire des street hits avec une miniscule fraction de sample jazz, et les pensées du sage Guru décrits par sds textes catalysés par une voix claire et un flow précis ont déchaîné les consciences.
Ce qui est d’autant plus remarquable et rare avec cette oeuvre, c’est de pouvoir faire vingt morceaux aussi variés qu’impressionnants. D’entrée, dès la premières piste, morceau culte : « You Know My Steez« . Le découpage du sample bien calé sur le beat est magique. DJ Premier peut capter aussi des atmosphères asiatiques sur « Above The Clouds » pour satisfaire à Inspectah Deck en provenance du Wu-Tang, ou pouvoir inviter les chanteurs K-Ci & Jojo (ex-Jodeci) sur le superbe « Royalty« , où Guru est justement royal. Deux standards de plus à leur actif et régulièrement joués dans les soirées hip-hop en mode « âge d’or ». Si Jeru n’est pas présent, les autres membres de la Gangstarr Foundation Big Shug, Freddie Foxxx, Krumbstnacha,… sans oublier les gros bourrins des M.O.P., compensent largement. Écouter débiter autant de rappeurs exceptionnels sur des productions de Primo sont juste des jouissances auditives. De plus le nombre d’invités est tout de même suffisant, vu le nombre de chansons.
Autre morceau d’anthologie, le premier titre de la série « The Militia« , puissant à souhait. Et quand Guru ne fait pas d’acrobaties microphoniques avec ses collègues, il lâche des textes géniaux et engagés (« The Robbin Hood Theory » par exemple). Les relations personnelles sont aussi sources d’imagination, surtout quand des principes comme la loyauté sont bafoués (les deux histoires tragiques de « Betrayal » avec un très bon couplet de Scarface, « B.I. Vs Friendship« ). Même la galanterie ne fait pas défaut à cet album, et c’est même avec classe que Guru rappe sur « She Knows What She Wants » qu’il co-produit. En terme de bon son Hip Hop, « What I’m Here 4 » est un excellent remède : « It’s the message in the song that makes you rock on ». Les boucles de soul/jazz aussi. Et il y a toutes les autres pistes qui composent ce disques, indispensables à cet édifice.
Nos deux Gangstarrs prouvent qu’après dix ans de carrière, un groupe est capable de faire son meilleur album. Chaque membre est un véritable virtuose dans son domaine. Beaucoup diront que leurs styles sont dépassés, ces gens-là ont absolument tort. Car si pour beaucoup d’artistes, l’intérêt c’est de vendre, d’autres ont pour souci de créer des classiques et d’élever l’état de l’art. Moment Of Truth très certainement leur meilleure cuvée, et se bonifie même avec le temps. Il marque définitivement l’empreinte du groupe dans le panthéon du rap Eastcoast, comme un incontournable des années 90 au même titre que les De La Soul, Public Enemy ou Tribe Called Quest. On prend toujours plaisir à y regoûter quelques années après, des fois qu’on aurait perdu le gout d’un hip hop ‘vrai’ et pur.
Qui sont ceux qui osent dire que leur style est dépassé ? :o)
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