Depuis toujours, le Jazz, la génitrice de toutes les musiques afro-américaines et urbaines, a été l’une des principales matières premières du Hip Hop, et qui, grâce au sampling, a indirectement transmis sa richesse et son âme dans bon nombre de grands classiques de rap américain. Puis, quelques groupes de fusion Hip Hop/Jazz ont émergé, des MCs entourés de musiciens, comme The Roots, les précurseurs en la matière, puis Beat Assailant, The Procussions,… Et cette tendance s’est installée en France depuis quelques années déjà au travers du Nujazz avec le DJ Cam Quartet (Welcome to Soulshine), les Hocus Pocus évidemment (avec l’incontournable 73 Touches), Oxmo Puccino & The Jazzbastards (Lipopette Bar) et désormais les Jazz Liberatorz, cette formation originaire de Meaux Town composée de DJ Damage, DJ Dusty et Mahdi. Le trio se fait connaître à partir de 2003 en écoulant des maxis pour collaborations avec des artistes estampillés Stones Throw comme Aloe Blacc, Declaime et Wildchild notamment, avant de se lancer dans l’aventure du long format début 2008 avec ce Clin d’œil (Kif Records).
Lecture, intronisation des Jazzlib en français s’il vous plaît, quelques claps, de la basse, « we’ve got the jazz », le discours de bienvenue de T-Love (que beaucoup ont découvert sur « Vocab ! » des HP), puis des Rhodes, s’ensuit de multiples clins d’oeils musicaux – dans le désordre – aux Tribe Called Quest, Pete Rock & CL Smooth, Slum Village,… Immersion totale de notre esprit. Tre Hardson termine cette introduction en faisant une rétrospective sur le Jazz et le fait que le mouvement Hip Hop en a repris le flambeau et l’héritage culturel. On devine alors le but de cet album est de rendre un brillant hommage au Jazz pour ce que le Hip Hop lui a emprunté, et beaucoup d’artistes américains sont venus remercier celle qui les a bercé et inspiré en honorant de leur participation à ce projet des 3 DJs. Parmi eux, des MCs légendaires de l’underground new-yorkais, comme Buckshot (Black Moon, Boot Camp Clik), Sadat X (Brand Nubian), et californiens, à savoir J.Sands (des Lone Catalyst) et Fat Lip (The Pharcyde), mais aussi Stacy Epps, J-Live, Asheru et plein d’autres encore. Chacun y va de ses références, allant de Quincy Jones, Wes Montgomery, Miles Davis, John Coltrane, le label Blue Note aux Last Poets, Dr Dre, Madlib, Oh No, 88 Keys, Hi-Tek, KRS-One, Rakim, Large Pro, Nas, Marley Marl, DJ Premier, Pete Rock, Public Enemy, Queen Latifah, Ice Cube, J Dilla,… la liste est longue.
Cette œuvre est un voyage dans l’espace-temps musical. Entre jazz traditionnel, contemporain et hip hop jazzy, elle se dégrade en divers teintes, du groove de « Ease Your Mind » à l’instrumental « Qidar » (joué avec le Soul Clan qui apporte des partitions de saxophone et piano), en passant par des chansons rap comme « The Return », le personnifié « I Am Hip Hop » et «Take A Time ». Les créations des Jazz Liberatorz sont de pures merveilles, simplement, il n’y a pas d’autres mots, ni même pour décrire les violons sur « The Process » de la rappeuse Apani B Fly, le smooth et sensuel « U Do » par Stacey Epps, le « Genius At Work » de Fat Lip & T-Love, sans oublier le magique « Speak The Language » chanté par Lizz Fields,… Il suffit d’écouter et de se laisser emporter. Ce Clin d’œil demeure un modèle d’équation entre Hip Hop et Jazz, une remarquable alchimie à la fois commémorative et salvatrice.
(chronique écrite le 29 Janvier 2008 pour Rap2K.com)
Album magnifique! Et dire que les références en rap français pour certains sont ROH2F ou B20BA!…
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