Parlons ventes directement: 8 point 5 millions de ‘Country Grammar‘ vendus rien qu’aux Etats-Unis, dont 3 vendus l’année de sa commercialisation en 2000, joli score pour un premier disque. Le début du millénaire annonçait les prémices d’une vague sudiste qui jusque maintenant continue de tout engloutir comme un tsunami. À la différence près que Nelly n’est pas tout à fait du ‘Dirty South’ proprement dit, mais du ‘Midwest’, puisqu’il provient de St Louis pour être exact. Pour la comparaison, c’est comme si un rappeur qui débarquant d’Auvergne au début du millénaire se mettait à vendre plus de disques que les ténors IAM, Passi, NTM,…
Nelly n’est pas vraiment à considérer comme un rappeur à part entière, son phrasé est mélodique, chantonné. Niveau musique aussi, les beats sont ‘bounce’ (comme on disait), agrémentés de mélodies et instruments assez exotiques (genre vibraphones, etc…). La conjugaison des deux est idéale, tout les éléments étaient présents sur ce disque pour en faire un succès considérable, à commencer par l’hymne éponyme « Country Grammar« , où Nelly rappe dans son slang du coin (allez on rechante le refrain « Shimmy shimmy cocoa listen to it now/Light it up and take a puff then pass it to me now »). Ça c’est pour le côté grammaire campagnarde. Pour le côté ‘country’ (music), ça partait déjà en pop/rap (« Take A Ride« ). Mis à part cet écart qui a culminé dans les charts de singles, le disque regorge d’autres bons hits bien frais tels que « E.I.« , « Batter Up » et « Steal The Show » avec son groupe les St Lunatics. Un nouveau style est né, le Midwest Swing.
Les thématiques du rappeur pourront déjà paraître limitées. Nelly avait tout du cliché du rappeur bling-bling (bien que l’expression ne soit pas autant répandue en 2000). Néanmoins, réussir à faire un tube en parlant de son sport favori, le baseball (ce qui changeait du basket et du football américain), avec « Batter Up« , chapeau! Alors qu’en France, on était traumatisé par le morceau de Stomy Bugsy sur le football (CF la BO de ‘3-0’ pour ceux qui arrivent à s’en souvenir). Une excellente question : qui produit tous ces bons morceaux? Jason ‘Jay E’ Epperson des Bassment Beats, un producteur assez discret toutefois, et City Spud. On continue à écouter d’une oreille assez curieuse « Wrap Sumdem« , « Thicky Thick Girl » et « Loven Me » lègerement latino (le rappeur possède des brins d’ADN d’origine hispaniques). Lil Wayne, qui n’était alors connu que comme le membre des Hot Boyz, réalise une apparition sur « For My » et le comique Cedric the Entertainer est venu filer un coup de pub sur quelques interludes.
‘Country Grammar‘ n’a pas été l’album d’un one-hit wonder, l’avenir le prouvera assez vite avec NellyVille. Le tour de force de Nelly est 1) d’avoir mis la bourgade de St Louis sur la map du rap 2) de s’être basé sur un style de rap musical avec une véritable identité sonore propre mais hélas éphémère. Effectivement, l’immense succès de ce premier album et les rouages de l’industrie du disque finiront par avoir raison de son potentiel artistique, ça aussi l’avenir le prouvera assez vite…