Qui est Snoh Aalegra? Une chanteuse d’origine suédoise vivant à Los Angeles et qui fut l’une des toutes premières signatures du label ARTiums Recordings, le label de No I.D. (qui contient dans son catalogue Vince Staples, Common et Jhene Aiko). Qu’est-ce que FEELS? Mon plus gros coup de coeur de l’année 2017.

Mais qui est réellement Snoh? Une artiste extra-terrienne, qui efface les frontières entre les genres musicaux et les époques avec une aisance sidérante. Elle puise dans les influences hip-hop, trip-hop, divers types de soul music (vintage comme nusoul), et même r&b, pour confectionner cette oeuvre qu’elle considère comme de la ‘soul cinématique’. Et pour comprendre de quoi elle parle, il suffit d’écouter FEELS, c’est la meilleure réponse que je puisse donner.

Ce que je peux dire également, c’est qu’on tombe, écoute après écoute, de plus en plus sous le charme de cet album incroyable, jusqu’à en tomber amoureux, enivré par la foule d’émotions qu’il procure à l’intérieur de nous, des tripes au cerveau en passant par le coeur et quelques décimètres carrés de peau qui frissonnent. Sans être « émo » comme l’est le r&b contemporain, ou comme ces autres chanteurs dont la voix ne font vibrer personne, à moins de rendre tout artificiel avec l’autotune. Rien de tout ça en ce qui concerne Snoh Aalegra, tout est « bio ». Sa voix possède un grain qui ne laisse pas indifférent, sa maîtrise est parfaite et, point important, elle a le groove. J’oserai même -soyons fous- la comparer à la Mariah Carey de la première moitié des années 90, avec moins de coffre certes, celle qui chantait de superbes slows. Et pour les titres rétros, on pourrait la confondre avec la soeur cachée d’Amy Winehouse. Mais peut-être que je m’avance un peu trop.

Comme je le disais, Snoh jongle entre les styles de soul de tout temps avec des featurings exclusivement hip-hop, s’attardant particulièrement la soul rétro (« FEELS« , « You Keep Me Waiting » avec Vic Mensa et le psychélique « Walls« ), jusqu’à se terminer par une chanson soul/jazz orchestrale à la Jazzanova, « Recent Times« . J’avais dit également nusoul, avec en exemple « Sometimes » (feat Logic), jusqu’à revenir au temps présent sur « Like I Used To » avec Timbuktu (oui la star scandinave et non pas le DJ) et « You Got Me« . Pour le single « Nothing Burns Like The Cold » (avec un court couplet de son collègue Vince Staples), qui rappelle les températures de son pays d’origine, l’aspect trip-hop prédomine par défaut à cause de ce sample de « Glory Box » des Portishead? Non, directement le sample originel, « Ike’s Rap II » d’Isaac Hayes. Et à chaque fois, Snoh Aalegra nous transmet ses sentiments, de tristesse, de joie, d’envie, l’ivresse de l’amour, le manque, de vulnérabilité, de bien-être, et plus encore grâce à la musique et l’interprétation.

Alors oui, effectivement, toute cette chimie nous fait imaginer des scènes de films qui pourraient correspondre à l’atmosphère d’un film romantique et conceptuel. On veut vivre avec elle chaque plan dans cet univers sans défaut, où il difficile de résister à cette ballade accompagnée à la guitare sèche qu’est « Fool For You » (qui rappelle la douceur ensoleillée du premier album de Corinne Bailey Rae), dans lequel on ne peut réprimer cette angoisse de la solitude nocturne à l’écoute de « Time« . Le vintage « FEELS« , « Worse » et le précieux « Out of The Way » ont de quoi faire fondre des coeurs comme du chocolat au bain-marie, sans jamais verser dans la guimauve. Exceptionnels sont ces albums aujourd’hui qui mettent en plein dans le mille à chaque chanson, de différentes manières, avec une telle versatilité.

On finit par réaliser au bout du compte avec FEELS que Snoh Aalegra est une perle rare, une femme renversante, un diamant brut qui ne mérite que des éloges. De plus, elle génère à la fois ces sentiments de proximité et de distance, ce truc d’icône familière et intouchable qui peut faire d’elle une grande artiste en devenir. Il n’y a plus qu’à prier pour que le monde la découvre, s’il la mérite.