Kid Cudi « Man on the Moon: The End of the Day » @@@@1/2


C’est l’histoire d’un gamin qui avait était tout le temps la tête dans la lune. Né Scott Mescudi et élevé dans un modeste quartier de banlieue de Cleveland par des parents instituteurs, un couple mixte africain et mexicain américains, cet enfant semblait mener une vie normale d’enfant de couleur aux Etats-Unis. Jusqu’à ce que son père disparaisse des suites d’un cancer alors qu’il n’avait que 11 ans, provoquant chez lui un profond traumatisme.

Pour fuir cette dure réalité, le gosse Mescudi se repliait sur lui-même et vivait dans son imaginaire pour s’évader. Puisque son géniteur était un artiste peintre à ses heures, il rêvait de devenir artiste lui aussi, comme papa. Inspiré par la mouvance Native Tongue durant ses études, il décide, à 20 ans, de devenir rappeur et s’en va à Brooklyn, New-York, pour s’imprégner de la culture Hip-Hop.

Quatre ans plus tard, Internet devient le lieu de naissance d’un « kid nommé Cudi », intitulé francisé de sa première mixtape (lire la chronique), par le biais de son titre « Day N Nite », qu’il avait enregistré un an auparavant après une rupture – pour l’anecdote. Le monde ne se doutait guère lors qu’il venait de rencontrer un véritable phénomène hip-hop tout plein d’imagination. Et l’imagination, comme l’univers, n’a aucune limite.

A Kid Named Cudi nous a présenté ce bonhomme lunaire au style remarquablement novateur, pour ne pas dire inclassable. Associé au mouvement hipster-hop, cette génération de rappeurs cools bercés par le rap des années 80 et 90, il part pour définir de nouveaux codes dans le hip-hop avec un son teinté d’électro et de pop. Le jeune rappeur connaît alors avec l’orbital « Day N Nite », un succès météorique, encore plus quand les italiens des Crookers le boostent dans tous les clubs de la Terre. En chantant l’apologie de sa solitude, Kid Cudi n’est plus seul, les gens l’écoutent. Et ce n’est pas tombé entre n’importe quelles oreilles. Durant cet été 2008-là, Kanye West tournait en Europe et à chaque fois qu’il faisait étape dans une boîte de nuit, cette chanson le suivait. Intrigué, il a demandé à son entourage qui était ce Kid Cudi, d’où il venait, est-ce qu’il était signé… Aussitôt rentré, il le fit signer sur son label Gettin’ Out Our Dreams, pour que le gamin puisse transformer ses rêves en réalité. Alors que « Day N Nite » n’était pas encore sorti en CD single !

Un an plus tard, quasiment jour pour jour, Man on the Moon, en référence à l’une des pièces présentes sur sa mixtape, nous révèle les faces cachés de Kid Cudi en racontant son histoire en cinq actes. Le premier acte, The End of the Day, qui est le sous-titre de l’album), débute au crépuscule, lorsque les songes de Kid Cudi se concrétisent par « In My Dreams », un lent down-tempo recouvert d’une symphonie synonyme de plénitude absolue, comme un rideau de nuit scintillant d’étoiles dans le ciel. La transition avec A Kid Named Cudi se fait en douceur, ce premier essai reprend les mêmes producteurs que sa tape, à savoir Plain Pat et Emile. La fin de cette introduction ma Foi atmosphérique nous permet d’identifier le narrateur de l’album : Common en personne. Puisque cette oeuvre s’annonce très personnelle tant du point de vue du récit que du style, hip-hop alien, autant le faire sur une chanson qui représente ces deux aspects : l’électro-psyché « Soundtrack To My Life ». La caméra tourne en orbite autour de Kid Cudi, narrant les grandes lignes de sa vie du décès de son père à ses errances dans les volutes de cannabis.

De « Simple As… » à « Mr Solo Dolo » passe un nouvel acte, Rise of the Night Terrors, et une baisse sensible du rythme. « Mr Solo Dolo » est un titre personnifiant le vide autour de soi, le vide d’une pièce où l’on se trouve seul avec sa conscience, où rien ne se passe, juste le temps qui passe, en même temps qu’une angoisse s’installe dans notre esprit. La musique décrit parfaitement cette situation. Pour dissiper son énergie, Kid Cudi interprète ensuite son hymne « Heart of a Lion », une arythmie électronique en 3D sonore produite par Free School, précédent le grandiose « My World » feat Billy Cravens. Le beat est comme cassé, mais les synthétiseurs au refrain donne des dimensions immenses à ce titre et des pouvoirs à Cudi. Jeff Bhasker, collaborateur de Dr Dre, a travaillé sur cette chanson. Mais vous verrez plus tard que le gosse de Cleveland va aller encore plus loin dans cette quête intérieure qui rejaillit sur l’extérieur à travers la musique.

Taking a Trip est le nom du 3e acte, intégrant « Day N Nite » dans sa version originale et que l’on ne présente plus. On en arrive à « Sky Might Fall », dont l’instrumental métallique et la mélodie sont l’oeuvre de Kanye West, le maître dépassé par l’élève. Certes, Kid Cudi n’est pas producteur mais il a su s’entourer de personnes qui ont pu donner vie à sa créativité. Will.I.Am et Swizz Beatz l’aurait approché mais leurs contributions auraient pu dénaturer le monde qu’il s’est construit. « Enter Galactic (Love Connection pt 1) » est une pièce du puzzle intégralement électro à vocation nightclubbing, produite par les Illfonics. Pas du goûts de tous les b-boys, potentiellement recommandé pour les dancefloors sous les laserlights.

A mi-parcours, on peut affirmer que Kid Cudi est la révélation rap alternatif 2009, et il emmène dans son aile une autre révélation : Ratatat. Sur l’acte IV de Man on the Moon, on découvre ce duo d’artistes électro à la production de « Alive », une track très originale à la limite de la pop music, et sur le troisième single « Pursuit of Happiness », rencontre du troisième (et quatrième type si l’on peut dire) avec les MGMT. Invraisemblable ? Non, tout bonnement incroyable, comme ce sample très osé de « Pokerface » de Lady Gaga en version acoustique repris pour « Make Her Say », pure fantaisie avec Kanye et Common en featuring. Tout à l’heure je disais que Kid Cudi est allé très loin dans l’expansion musicale : « CuDi Zone » procure de fabuleuses sensations d’infini avec tous ces violons qui virevoltent partout autour de lui. Dans la tête de ce garçon, c’est le big bang.

Enfin, 5e et dernier acte, A New Beginning. Sur « Hyerr », Cudi et son pote Chip The Ripper posent leurs couplets sur cet instru d’inspiration down south produite par Crada, avant de franchir pour de bon la frontière avec la pop sur « Up, Up & Away (The Wake & Bake Song) ». Il est allé vraiment très loin, là où aucun n’a mis le pied auparavant. Une ligne supplémentaire pour parler de l’édition Deluxe, avec un DVD mais surtout trois extraits symptomatiques de Kid Named CudiMan on the Moon », « TGIF » et « Is There Any Love » avec Wale) et le remix vitaminé de « Day N Nite » par les Crookers qui a écumé les playlists l’été ’08 et ’09 !

Man on the Moon n’est pas réellement un OVNI, c’est l’OVNI qui nous sert de véhicule dans un univers virtuel caractéristique de Kid Cudi, intégré dans notre univers quantique. Sa musique hip-hop alternative est extrêmement novatrice, comparable à du cristal : brillante, propre, limpide. Et comme sur la lune, la gravité est six fois plus faible sur Terre, pas de doute que ce garçon fera de grands bonds. Une ère nouvelle s’annonce…

28 commentaires Ajouter un commentaire

  1. niko dit :

    rien a dire a part que c un album surestimé ! futur classique du rap? je l’espère pas mais alors pas du tout.

    J’aime

  2. escobar56 dit :

    Album incroyable. Une révolution musicale pour le Hip Hop synonyme de changement de courant artistique. Comme Lupe Fiasco avec son Food & Liquor, ce Man On The Moon deviendra très très grand.

    Clairement le futur classique du rap pour moi. 19 / 20 !

    J’aime

  3. RCynok dit :

    Ratatat est tout sauf une révélation, il est bien connu sur la scene electro-pop, écoutez Classics c’est vraiment bon. La population réagit toujours un peu en retard mais c’est pas grave ratatat gagne à etre connu.

    J’aime

  4. denisot dit :

    Pas rentrer dans son « délire » dsl

    J’aime

  5. By Nayon dit :

    post sur kid Cudi une autre facon de voir les choses….
    wwww.bynayon.com

    J’aime

  6. lemy dit :

    SAGI franchement je vais être honnête….j’ai écouté l’album….c’est une bouze..j’ai trop de mal avec son flow..et puis je trouve que l’on a un peu trop « surbuzzé » le personnage..y’a un morceau qui reste dans le crane malgré lui c’est « make her say » le pire c’est qu’il a rien a voir avec le reste de l’album..Mais bon il a eu le mérite de prendre des risques…je le félicite rien que pour sa..

    J’aime

  7. WestCoastMVP dit :

    Album ‘lolesque’, je trouve ça nul… j’accroche pas du tout au style et pour couronner le tout, je trouve les skillz du mec très médiocres.

    J’aime

  8. MurPhy!!! dit :

    Encore sans rapport, mais pour t’as chronique de Blueprint 3, je me disait que tu pourais la faire dans le sens ou c’est Beyoncé qui en parle! Je sais pas si sa va te donner de l’inspiration lol mais au vus de tes chronique je sais que tu pourais en faire quelque chose de bien drôle (si tu retiens l’idée bien sur)

    J’aime

    1. Sagittarius dit :

      Bah en fait je songe à faire comme si Jay-Z parlait de son disque, en reprenant ses rimes. On a fait des fausses interviews et des faux agendas avec Raging Bull mais on ne parlait pas réellement de l’album.
      Mais je parlerai de Beyoncé que Kanye a défendu aux MTV VMA je pense, pour la dérision.

      J’aime

  9. organix dit :

    Aucun rapport mais tu trouves que OB4CL2 est un classique ?

    J’aime

    1. Sagittarius dit :

      Personnellement oui, mais je dois être l’un des rares à le penser lol J’ai réécouté le premier et je me dis que cette suite est excellente.

      J’aime

  10. MattKambz dit :

    J’ai écouté l’album sur MusicMe, ouais bof……..
    Enfin non, il est très trés bon cet album-là!
    Simplement il est tellement  »à part » que c’est vraiment on adore soit on hait à mort!!
    Moi je suis assez partagé, autant musicalement c’est une bombe, autant les performances de Cudi sont chiantes à la longue!
    Son flow chantonné, son grain de voix, ses lyrics déroutent aux premières écoutes mais deviennent lassantes par la suite!
    Dans l’ensemble, c’est mou, ça manque de tracks pour relever le tout à la ‘Is there any love’ et les lyrics sont pas super intéressants dans l’ensemble!
    Et puis ‘Make Her Say’ n’a pas du tout sa place dans l’album, les lyrics tranchent beaucoup trop avec l’univers décrit dans l’album (et puis c’est quoi ce couplet à chier de Common?!?).
    Bref je suis assez mitigé!

    J’aime

    1. yak dit :

      @mattkambz

      magnifique ce que tu dis
      en deux phrase tu dis tout et son contraire, c est beau !!
      on adore ou on deteste et apres en meme temps je suis partagé.
      parfait rien à ajouter

      J’aime

      1. Mattkambz dit :

        Je dis pas tout et son contraire!!!
        Ma première phrase parle en général de l’album et la deuxième est personnelle, ce que j’ai pensé de l’album.
        Il y’a rien d’incohérent là-dedans, non?

        J’aime

  11. No' dit :

    Très bonne chronique! Maintenant nous n’assistons qu’aux prémices de sa carrière, laissons lui temps de révolutionner la musique. Après tout à ce qu’il en a l’ambition? J’ai aimé son album et je ne m’attendais pas à autre chose, je pense que ces précédentes mixtapes donnaient assez bien le ton. C’est tout à l’honneur de Kid cudi de nous avoir offert une alternative et d’avoir pris de tels risques pour un 1er album

    J’aime

  12. deenastynova dit :

    Qualifier d’Ovni tout album original… C’est pas un Love Below d’Andre 3000 ou un Electric Circus de Common, ni un Phrenology des Roots, ni le dernier Sa-Ra.
    Maintenant je suis partagé sur cet album avec de grand moments comme l’intro et des chose qui baigne dans la facilité dont le remix Crookers remix mieleux qui n’est pas sans nous rappeler un certain David Guetta.

    Mélanger de la Pop et du Hip Hopest une bonne idée, mais Kid Cudi estsur un terrain beaucoup trop glissant pour un premier album. On a l’impression que même s’il chante, Kid Cudi pose très mal. Il y avait pourtant de bonne idées mais je suis persuadéque Cudi n’a pas la maturité (carrière) musicale suffisante pour nous sortir un album révolutionaire.

    J’aime

  13. MurPhy!!! dit :

    Pour moi, cette album c’est un peu le 808 & Heartbreak parfait!!! Kanye West a tenté de créer un univers mais Kid CuDi, lui, on a l’impressiuon qu’il vient drectement de cette univers! On voit qu’il maitrise ce style de bout en bout. Mon gros kiff de cette année après toute les déceptions de plein d’artiste que j’attendais!

    P.S: J’attends avec impatience ta chronique de Blueprint 3 qui sera, je l’espère, dans le même style que celle de Port Of Miami et American Gangstere!

    J’aime

  14. akels dit :

    Ah et aussi , Ratatat est un duo de producteur (électro pour être précis) ;)

    J’aime

    1. Sagittarius dit :

      Merci, je rectifie cela!

      J’aime

  15. Djibi dit :

    Une très bonne surprise ce KiD CuDi!
    Assurément le ‘Rookie’ de l’année et un album qui figure dans mon top 5 de 2009!!

    J’aime

  16. calme dit :

    C’est marrant, mais cet univers hip hop, pop, dance, c’est en retirant l’autotune,
    Les memes ingredients qu’on retrouve sur le dernier kanye,
    Or la critique passe mieux,

    D’ailleurs je soupconne kid cudi, present sur welcome to heartbreak, de ghoswritter le disque entier…

    man on the moon est une tuerie, on crie au genie,
    Mais kanye 808 est l’oeuvre du même genie. Bcp moins apprecie sur ce blog,

    Et pourtant, l’oeuvre du même genie.

    J’aime

    1. Drummer dit :

      La ou je pense que kanye west a raté son pari c’est qu’au lieu de l’interpreter avec l’auto tune ,il aurait du assumer sa prpre voix.cet auto tune gache terriblement lalbum surtout que la musique est tres bonne.Il nya qu’a ecouter welcome to the heartbreaer ou lauto tune de kanye gache cette chanson magnifique mais prend
      forme avec le refrain de kid cudi.

      J’aime

  17. Mastazob dit :

    Pour ajouter, certains refrains sauvent des chansons (Mr Solo Dolo, Heart Of A Lion, My World…)

    J’aime

  18. akels dit :

    Un album complet et complètement marginal . Pourquoi 808’s & Heartbreak n’est pas à lui …

    J’aime

  19. Mastazob dit :

    Il est parfait l’album, j’ai adoré.

    J’aime

  20. escobar56 dit :

    Une bombe atomique !!!!

    Ma chronique arrivera juste après celle du Blueprint 3. Mais en tout cas la tienne décrit bien ce que j’ai pensé de cet opus.

    J’aime

Postez vos avis!

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.