Les temps deviennent durs quand on est un MC au talent incontesté et pourtant méconnu. C’est un peu l’histoire de Mad Skillz, ghostwriter de luxe et tueur de micro de profession. Sa dernière mésaventure avec Rawkus lui a valu la sortie d’un disque mort-né, ‘I Ain’t Mad No More’ et le préfixe ‘Mad’ a fini par être amputé. Il rebondit dans l’actualité en répondant à l’attaque ridicule de… Shaquille O’Neal. Shaq, le rappeur-basketteur. Malgré les 130 kgs et 2m10, le joueur des L.A. Lakers n’a pas fait pas le poids contre les rimes assassines de Skillz, c’est un peu l’histoire de David et Goliath qui se répète et c’est évidemment notre clasheur côté droit qui l’emporte, mettant un terme à cette embrouille sur « Shaq VS Shaqwan », non sans humour.
Note : drôle de manière de présenter un album qui tentait à la fois de repackager quelques morceaux de I Ain’t Mad No More et des nouveautés. Ce clash avec Shaq était-il une coincidence ? Depuis cette année 2005, Skillz a commencé ses fameuses retrospectives annuelles avec « The Rap-Up ». Et on ne sait toujours pas pour qui il écrit comme un fantôme !
Quand on habite Richmond dans l’Etat de Virginie, il devient difficile de classer un rappeur. Mais des producteurs voisins ne sont jamais loin : Timbaland et The Neptunes ! Le premier commence le disque avec « Off The Wall », un bon compromis entre banger et punchlines. Pharrell enchaîne ensuite avec l’instrumental de « Suzie Q », Skillz adaptant son flow aisément et les crooners Cee-Lo et Jazze Pha assurent le refrain. Pour l’anecdote, ce morceau devait figurer sur son précédent disque inédit. Pour les onze autres morceaux, ce sont Nottz, Rik Marvel et Skillz lui-même qui s’occupent de la production, exception faite avec Hi-Tek (« Y’all Don’t Wanna Do That »), glissant des mélodies souvent agréables en dessous des confessions de notre ghostwriter.
Skillz sait être ambianceur de soirée toujours dans un esprit très Hip Hop et festif, en atteste « Wave Ya Hands » invitant le chanteur nusoul Musiq Soulchild qui fera bouger plus d’une tête et paire de jambes. Le MC est un véritable problème car il peut se balader dans les boîtes de nuit, dans les concerts et en studio sans mettre en péril sa vocation ni le respect qu’on lui doit. Sa tactique c’est l’attaque et crache quelques rimes sans contradiction aucune, nous faisant ouvrir les yeux et les oreilles sur l’état du rap en ce moment. Sa férocité n’a d’égal que la véracité de ses propos incendiaires qu’il balance sans gêne sur « PA to VA », « Imagine » et « Who I Spit For ». Et rares sont les rappeurs de son genre à jurer fidélité à l’art du Hip Hop et non à l’artifice.
Il ne faut pas croire non plus que cette bête affamée se prend uniquement pour un moraliste, loin de là. C’est jamais évident d’exprimer ses émotions les plus sincères mais il le réussit plutôt bien (« You Only Get One »), avec presque une déclaration d’amour sur un fond des Cat Stevens sur « Hip Hop ». Expressément recommandé à tous ceux qui savent reconnaître le vrai du faux.