Cela faisait presque cinq ans que l’on avait plus de nouvelles de Black Rob. Après le succès de ‘Life Story’ et sa consécration de platine, BR s’est enfoncé dans la luxure et la stupre, et commença à vider son compte en banque à 200 à l’heure. S’ensuivit une longue et glissante descente aux abysses de l’enfer, sombrant dans la drogue, l’alcool, les dettes, les problèmes de santé, les cures de desintoxication, les petits séjours en prison lorsque ce n’est pas dans des chambres d’hôtels miteux des quartiers. C’était ça la vie de Black Rob, profiter à l’excès jusqu’à de sombres extrémités au point de presque finir SDF. Contrairement à beaucoup de rappeurs dans le milieu, Rob n’est pas du genre à renier ses origines et ses vieilles habitudes de mauvais garçon comme sa petite histoire en noir et blanc nous montre. Jusqu’à ce qu’il se resaisisse et revienne frapper à la porte de Bad Boy Records, avec un Diddy qui lui a ouvert les bras en lui laissant une seconde chance. Black Rob est de retour, et plus affamé que jamais.
Pas de concessions pour ‘The Black Rob Report’ : pas de featuring sudiste douteux (sauf son ami Petey Pablo le temps d’un interlude parlé), ni de single radio, ni même de sonorités R&B pour faire plaisir à monsieur-tout-le-monde et encore moins de gros noms en guest. Juste du bon gros son new-yorkais épuré et produit par le collectif des Hitmen (Tony Dofat, Derek ‘D Dot’ Angelettie) et des producteurs dont la réputation n’est plus faire sur la côte Est (Buckwild, Coptic, Scram Jones, TruMaster…). Et d’entrée, ça ne rigole pas. Pour ceux qui ont oublié ce MC trop sous-estimé (au point que ce disque soit passé inaperçu dans les bacs), Black Rob sort ses papiers sur « BR », qui suit un schéma similaire à son classique « Whoa! ». Sur « Watch Your Movements » feat Akon, Black Rob manifeste une rage de vivre qu’on ne lui connaissait pas et que l’on ressent dans son flow et ses textes qui sentent les rues de Harlem et les spasmes d’une vie antérieure abominable, qu’il décrit surtout sur « Long Live BR ». On peut dire que c’est l’un des rares rappeurs à disposer d’une crédibilité sans faille malgré des mesaventures qu’on ne souhaiterait à personne, BR a de quoi se vanter d’être une « Star In Da Hood ».
Le bad boy soldier s’en va en guerre avec des gros calibres chargés à bloc, à la vie à la mort, annonçant la marche à suivre sur « Ready » : tambours militaires, refrains enfantins, bref, un banger sentant la dynamite. Lancer de cocktail Molotov avec la bombe « Fire In Da Hole » et son refrain très accrocheur, armé jusqu’aux dents sur une instru ragga (« Warrior »), Black Rob n’essaie pas manifestement de se racheter mais de passer directement à l’offensive sans laisser aucun repit à l’auditeur. Même quand il s’agit de parler de femmes, les sujets restent très crus (« Smile In Ya Face ») et loin d’être glamour, même si « She’s A Pro » feat Mr Porter dégage un côté chic de part son ambiance nocturne. Non, la démarche de Black Rob est de vouloir faire un album aussi authentique que le premier, de bout en bout. Quelques lignes aussi pour parler de « Y’all Know Who Killed Him », un titre qui fait froid dans le dos lorsqu’on entend la voix de Notorious BIG. Ceci n’est pas un couplet inédit ou un simple sample de voix, puisque les raps sont tirés de « My Downfall » pour faire le refrain de ce morceau. Pensée pour ce grand monsieur du Hip Hop.
On aurait pu croire que Diddy aurait pu mettre son grain de sel pour imposer un morceau passe-partout, mais non, vous vous trompez. D’ailleurs c’est dommage qu’il n’y ait pas un hit de l’ampleur de « Whoa » ou « Espacio » histoire de passer le niveau supérieur et offrir un véritable classique au sens propre. Ceci étant dit, après un temps de latence de plusieurs années, Black Rob nous prouve que son talent demeure avec ‘The Black Rob Report’, qui ne risque pas du tout de décevoir les fans de ‘Life Story’. Hautement recommandé, et dépêchez-vous de le vous le procurer en import car il n’y aura pas pour tout le monde.